DIRE ET REDIRE (suite)

« Il est difficile de savoir dans quelle mesure la prononciation des speakers de la radio et de la télévision peut, à la longue, influencer celle des auditeurs. » p. 131 extrait de Pour un dictionnaire de la prononciation , André Martinet, dans Le Français sans fard, Éditions PUF.

On peut s'amuser de retrouver sous la plume d'un linguiste, le phénomène de l'intégration des anglicismes dans la langue française dont il était question dans mon dernier post. Cette citation qui date de 1964, est la parfaite illustration de la bonne santé de notre langue capable d'éliminer d'elle-même des anglicismes inappropriés. Sans doute, le mot speaker a été adopté pour répondre à de nouveaux besoins, à de nouvelles réalités, par facilité ou pour suivre la mode comme ne manquerait pas de le faire remarquer l'Académie. Mais la mode, plus puissante que les sentences des lettrés, reste le plus sûr moyen de démoder la mode et plus personne aujourd'hui n'emploie le mot speaker pour parler des présentateurs ou des journalistes qui travaillent pour une radio ou une chaîne de télévision. Les technologies elles-mêmes se renouvelant plus vite qu'une génération (la cassette vidéo aura duré quarante ans mais qu'en sera-t-il du mp4 ?), il va nous falloir beaucoup de mobilité, beaucoup d'essais et sans doute produire beaucoup de déchets pour trouver, adopter et entretenir les bons mots qui désigneront tous les appareils et tous les moyens de communication à venir. Seuls resteront les mots avec lesquels chacun de nous reconnaîtra une action ou un objet. Par exemple, le verbe mixer, adopté dans les années 50 dans les techniques du son, (le mixage), puis dans la cuisine dès les années 70, semble avoir de beaux jours devant lui. Son succès révèle sans doute, le désir partagé par une large communauté, de trouver une autre façon de se mettre à table.