Retour aux Fondamentaux

Les ronds dans l'eau, la bulle de savon, le cône de sable appartiennent à la catégorie des grandes figures géométriques concrètes qui se réalisent sans calcul et qui sont la conséquence d'actions simples. Jeter : des cercles concentriques se propagent à partir du point de chute d'un corps sur une eau plane. Souffler : des sphères s'envolent, air enclos dans une pellicule transparente. Verser : le sommet d'un cône s'élève à la verticale du point où du sable s'écoule. Ces formes ne nécessitent ni connaissances ni virtuosité pour être exécutées. Il suffit de savoir se réjouir de les voir apparaître. Toutefois, le motif qui me pousse à les reproduire ne tient pas tant au plaisir de les contempler qu'à l'étonnement suscité par l'écart que je constate entre la précision géométrique de ces figures et l'approximation des gestes qui les provoquent.

Les ronds dans l'eau se propagent en même temps qu'ils se dissipent. Dès qu'ils apparaissent, ils commencent à disparaître. La bulle de savon trouve sa forme parfaite au moment de son envol. Elle se distingue au moment où elle m'échappe. Il faut un écoulement pour monter le sommet d'un cône de sable sur l'instabilité même de ses contours. Son élévation est aussi une chute. L'onde mouvante, la pellicule fragile et le grain instable composent ici des formes parfaites mais insaisissables. Je vois leur nature éphémère non pas comme le signe de la vanité des choses mais plutôt comme une invitation à les reproduire. Œuvres premières qui orientent mon attention sur leurs causes fortes de leurs effets invariables. Art sans évolution, antérieur à la recherche des beautés inédites, qui impose un temps où la perception est subordonnée à la répétition.